La femme bleue – Claude Donnay
Quand deux éditeurs particulièrement exigeants se rencontrent que font-ils ? Ils doivent sans doute se raconter des histoires en vers. En l’occurrence quand Claude Donnay, éditeur chez Bleu d’encre, croise la route de Marie Tafforeau, éditrice chez Le chat polaire, il lui raconte une histoire de femme bleue qu’elle apprécie et qu’elle décide d’imprimer. Ainsi aurait pu naître ce très joli recueil dont je ne connais absolument pas l’histoire mais que j’ai lu et beaucoup aimé. Claude y raconte le destin d’une femme bleue résidant dans un pays ensoleillé très lointain qu’un pauvre ténébreux attend avec impatience dans des terre beaucoup moins chaudes. « Deux terres. Deux êtres. / L’un debout dans le gris, l’autre baignant dans le bleu. / Entre eux une fracture de ciel et de mer. / Un gouffre où rampent des rêves en fusion » . Peut-être que cette femme n’existe que dans l’imagination du pauvre exilé ? Ou dans celle du poète ?
Alors, suivons le Ténébreux et le poète dans leur quête de la Femme bleue « … // Il est le Ténébreux, le Veuf, l’inconsolé. // Il rêve à la femme aux ailes blessées, prête à traverser / l’Atlantique pour nourrir ses petits ». Claude a déjà écrit un roman dans lequel il évoque la douleur de la migration, du départ vers un ailleurs inconnu. Il semble être particulièrement sensible à la douleur de ceux qui partent parce qu’ils ne peuvent pas rester. La Femme bleue est tout aussi déterminée que le Ténébreux, elle est animée de la même foi : « Elle veut (re)naître plus bleue que sa robe. / Et que le ténébreux l’emporte dans ses turbulences », « Personne ne remarquera qu’elle remplit l’assiette de l’absent ».
Claude a su choisir les mots pour dire le gris pays du Ténébreux, ce pays qui n’est pas le sien, comme il a su choisir les mots tout en couleur pour faire briller le pays de la Femme bleue. Des mots pleins de délicate sensualité et d’un érotisme empli d’amour et de douceur, loin de la vulgarité et de la trivialité, proche de la pureté sentimentale qui semble relier ces deux êtres. Les poèmes de Claude sont à l’image de ceux de la femme bleue : « Personne ne peut comprendre les poèmes / qu’elle enfante dans la douleur pour les confier au vent / … ».
Ces peuples du vent n’ont pas accès aux réseaux sociaux, ils sont épargnés des calamités qu’ils diffusent à foison, mais ils ont les mots, les vers, la poésie, …, l’amour et la foi en eux : « Non elle n’est pas idiote. Elle sait dans son cœur, elle sait entre ses cuisses. Les paroles naissent de son ventre. Elle les écrira demain dans son cahier d’écolière… ». Leurs sentiments n’ont rien de virtuels, ils sont bien réels et elle sait que demain sera un autre jour et que le Ténébreux reviendra ce dont l’auteur n’a jamais douté !
« Le désespoir n’existe, se dit-elle que si l’on refuse de croire aux possibles ».
Superbe lecture, fine et intelligente. Tu as tout compris, cher Denis Billamboz. Immense merciiiii
Merci Claude, c’est trop de gentillesse
Superbe lecture, fine et intelligente. Tu as tout compris, cher Denis Billamboz. Immense merciiiii
Incroyables possibles d un retour du bleu d un pays vers le bleu d un autre pays Deux continents au dedans d une femme au gré de vents de bleus différents