17 avril 2021 ~ 0 Commentaire

Un second cent de nouvelles pas neuves – André Stas

C’est la seconde fois qu’André Stas s’adonne à cet exercice oulipien qui consiste, comme il l’écrit lui-même, à « ouvrir un livre n’importe où, recopier la première phrase qui me tombe sous les yeux, recommencer l’opération dix fois », passer ensuite à un autre livre, pour en l’occurrence, produire cent textes, cent nouvelles pas neuves et parfaitement improbables. Il avait déjà produit un recueil sur le même principe au début du XXI° siècle. Il affirme qu’il ne choisit pas les textes dont il copie les dix fragments nécessaires à son exercice, « de choix il n’y en eut pas, mais juste mon plaisir et rien d’autre. Na ! C’est ce qui vous explique que l’on puisse de la sorte sauter hardiment des grandes gueules aux voix obscures de la chose imprimée, … ». Les auteurs que j’ai reconnus appartiennent au monde de la littérature que l’on dit souvent bonne, pour les autres je ne saurais dire s’ils sont des grandes gueules ou des voix obscures. Pour donner une idée à ceux qui hésiteraient à lire cet ouvrage tout à fait inhabituel, je dirais que les auteurs vont de A. Delahache au Marquis de Sade en passant par : Eduardo Mendoza, Serge Delarue, Erica Jong, Vito Roha, Claude Gaignebet, Aurel, Tristan Bernard (un Bisontin), Eugène Chavette, Italo Calvino et beaucoup d’autres pour en faire environ une centaine. La bibliothèque de l’auteur est joliment fournie, j’y ai trouvé des auteurs dont j’ai affectionné de lire un ou plusieurs ouvrages. Je dirai aussi que l’amour, charnel surtout, pourrait être un fil rouge entre un bon nombre d’entre eux.

André Stas est un spécialiste du collage et l’exercice auquel il se livre s’apparente à une certaine forme de collage de bouts de textes pour en faire un petite nouvelle, faire naître une histoire en utilisant des morceaux d’autres textes. Le résultat est moins incongru que je le pensais a priori, certains textes sont plus intéressants que d’autres écrits d’une seule traite par une main malhabile. Daniel Arnaut, dans la critique qu’il avait publiée dans le Carnet des instants de février/mars 2005 après la parution des cent nouvelles pas neuves initiales, écrivait : « L’effet est étonnant, et presque immanquable. La « nouvelle » en dix phrases ainsi obtenue a (presque) toutes les apparences d’un texte normal ». et je dirais même que certains textes sont tout à fait sensés, qu’ils sont souvent inspirés et contiennent même une certaine forme d’esprit. D’autres sont beaucoup plus oulipiens, saugrenus, mais jamais totalement inconvenants ou incohérents. Je pense comme Daniel Arnaut que pour se livrer à cet exercice, il faut avoir l’œil du lecteur assidu et le talent du collagiste sinon le résultat risque d’être plus aléatoire.

J’ai pris un texte au hasard et j’en ai copié les premières phrases afin que les lecteurs aient un premier aperçu de ce que génère l’exercice de cette pratique : « Aussi loin que remontent mes souvenirs, il y a toujours eu des sentinelles. Mes moments de repos étaient irréguliers. Je les avais balayés sous le tapis des bouteilles vides et des gueules de bois monumentales. Je m’installai au buffet, sans rien commander… » Delirium Tremens – Ken Bruen. Il faut aussi ajouter que la lecture consécutive de plusieurs textes ainsi conçus rend leur compréhension plus aisée, au point même que le lecteur ajoute ou modifie automatiquement les mots qui semblent manquer ou être mal choisis. On comprend bien après avoir lu ce type de recueil la complémentarité qui existe en l’auteur et le lecteur.

Et dire que certains pensent que copier n’est pas un art !

Cactus inébranlable éditions

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