L’Ecclésiaste
« Vanité, vanité, tout n’est que vanité. » Cette maxime des millions de fois répétée, mille fois écrite, inusable, inoxydable, introduit L’Ecclésiaste, ce court texte inséré dans la Bible hébraïque dans le Ketouvim, parmi les « Cinq rouleaux », entre les Lamentations et le Livre d’Esther. La Bible est composée de textes différents rassemblés dans un même livre dont il existe plusieurs versions. A la lecture de « L’Ecclésiaste » on pourrait penser que ce texte aurait été écrit par le roi Salomon lui-même, « Moi, l’Ecclésiaste, qui fut roi d’Israël dans Jérusalem, …, je résolus de rechercher et d’examiner tout ce qui se passe sous le soleil… », mais le contenu et la forme du texte ont orienté les exégètes vers d’autres hypothèses dont aucune, à ce jour, n’a pu être validée. L’Ecclésiaste reste donc un texte pseudépigraphe attribué à un auteur dont le nom ne correspond vraisemblablement pas à son l’identité réelle.
Ce texte selon les datations aurait été écrit entre le III° et le I° siècle avant notre ère. L’édition proposée par Louise Bottu éditions correspond à la traduction de Lemaistre de Sacy revue et corrigée par le préfacier : Frédéric Schiffter. Dans cette préface, il fait une lecture de L’Ecclésiaste en parallèle avec certains textes de Spinoza que je n’ai pas lus, je ne peux donc apporter aucune remarque à cette préface. Je pourrais seulement souligner que le préfacier a, chez ce même éditeur, publié « Le voluptueux inquiet », une réponse à « La lettre sur le bonheur » d’Epicure. On remarque donc qu’Epicure, le pseudo Ménécée et l’auteur de l’Ecclésiaste partagent une certaine vision de la vie sur terre.
L’Ecclésiaste estime que dans la vie tout est vanité, vanité au sens puérilité, futilité, vaineté, … « … J’ai trouvé que tout était vanité, à commencer par les actions des hommes qui ne sont que brassage d’air ». Tout au long de son texte, il répète que tout est vanité, l’argent, le pouvoir, les richesses matérielles, …, ne sont que vanité. Le riche comme le pauvre décédera un jour. Même les efforts sont inutiles car les fruits qu’ils porteront ne seront qu’éphémères. Le laborieux, le besogneux, ne seront pas récompensés de leurs efforts et n’auront pas meilleures fins que le fainéant et le profiteur. « On enterre le sage comme le fou ».
Selon L’Ecclésiaste, la vie ne serait qu’acceptation, résilience, mesure, sagesse. Il conviendrait, d’accepter le temps et ce qu’il contient comme ils viennent. Il récuse les philosophes et les scientifiques qui ne peuvent en rien améliorer la vie sur terre. « … j’ai constaté que même la philosophie n’épargnait pas l’accablement et, même, que la science accroissait la peine ». « Ne vaut-il pas mieux pour tout un chacun se contenter de manger, de boire, et de se satisfaire, mais seul, du fruit de ses travaux ? ».
La fatalité a accablé l’homme quand il est apparu sur terre, « Le seul péché dont les humains se rendent coupables génération après génération est celui de naître et leur châtiment celui de vivre ensemble ». L’homme ne changera a jamais son destin car tout a déjà été et tout sera à nouveau, le changement n’existe pas. « Pourtant ce qui s’est produit autrefois se produira à l’avenir, ce qui fut sera de nouveau ».
Ce qui m’étonne le plus dans ce court texte, ce sont la misanthropie et la misogynie affichées par l’auteur, même si on peut penser qu’autre temps autres mœurs, « … entre mille hommes on en peut trouver un estimable ; mais, parmi toutes les femmes, pas une seule ». Et pourtant la femme est bien nécessaire à l’homme pour qu’il vive en harmonie avec les préceptes énoncés par l’auteur : « Voilà pourquoi il nous faut jouir de la vie passagère avec la femme que nous aimons, pendant tous les jours de notre vie passagère ».
J’ai trouvé dans ce texte des principes qui pourraient avoir été empruntés aux Epicuriens et mélangés avec d’autres puisés chez les Stoïciens, impression personnelle, peut-être, mais ce qui est sûr c’est que ce texte semble bien peu religieux, il est surtout moral, conseillant de profiter de la vie en toute modération. « Profitons du bonheur quand il se présente et préparons-nous au malheur… » car « Le seul bonheur que Dieu donne aux hommes sous le soleil, et dont ils doivent se contenter de la naissance à la mort, consiste à manger, boire, se réjouir, se reposer ». Certains trouveront que c’est peu mais c’est déjà beaucoup quand on considère toutes les calamités qui ont affligé, affligent encore, et affligeront certainement toujours, l’humanité.
« La tragédie des hommes est que le monde n’est pas fait pour eux et qu’il n’y en a pas d’autre… »
Louise Bottu éditions
Un peu sombre et néanmoins réaliste, qui pose la question de notre présence dans ce monde!
Quant à la fatalité, « »" Pourtant ce qui s’est produit autrefois se produira à l’avenir, ce qui fut sera de nouveau »" ».
- avouons que mettre en garde nos proches n’a d’écho que lorsqu’ils sont confrontés au problème que nous souhaitons leur épargner .