Rebelle – Fatou Keïta
Rebelle elle l’est, Malimouna, petite Ivoirienne qui refuse l’excision alors qu’elle n’est encore qu’une enfant, elle a un argument de poids, elle a surpris l’exciseuse pendant ses ébats avec le chasseur le plus vaillant du village. Elle peut ainsi la faire chanter et échapper à la mutilation que l’exciseuse simule en pratiquant une petite entaille dans sa cuisse. Mais quand le vieux mari à qui elle a été livrée découvre le subterfuge, c’est le drame, elle doit alors s‘enfuir. Par miracle elle est recueillie par un couple de coopérants qui l’emploie comme nounou pour garder leur enfant jusqu’à ce que la femme s’aperçoive que son mari regarde la jeune fille avec un drôle d’air. Elle part alors chez d’autres coopérants qui arrangent son départ en France. Cette fois encore le mari s’intéresse un peu trop à elle et tente même de la violer, elle fuit encore et est encore sauvée par miracle avant de partir pour Paris où elle tombe, par miracle encore, sur de bons anges gardiens qui lui faciliteront la vie et les études afin qu’elle puisse devenir assistante sociale. Elle se met alors en ménage avec un Blanc qui la ramène en Afrique, là où elle voulait retourner, mais se sépare cependant de ce compagnon car sa famille ne veut pas d’une Noire. Son mariage avec un Noir tournant lui aussi au drame, elle se réfugie dans son militantisme féministe.
C’est un véritable catalogue de tout ce qui peut arriver à une fille africaine : l’excision, même si elle échoue, le mariage forcé, la fuite parce qu’elle n’est pas pure, la chance d’être bien accueillie en France et d’y suivre des études valorisantes, mais aussi l’impossibilité de vivre dans le monde des Blancs d’où elle ressort marquée du sceau de la corruption qui stigmatise à jamais celles qui ont fréquenté les Blancs. Elle cumule toutes les tares : femme noire impure qui a fuit son mari pour se réfugier auprès d’un Blanc, ça fait beaucoup pour une seule femme noire… surtout si elle milite dans un mouvement féministe.
Un récit un peu trop fourre-tout, un livre militant (à la fois contre les pratiques ancestrales et barbares à l’endroit des femmes africaines et contre l’incapacité des Blancs à comprendre les mœurs fondamentales de l’Afrique originelle) plus qu’un texte littéraire qu’on était en droit d’attendre de la part d’une femme docteur en lettres. Un texte trop manichéen, noirs ou blancs les hommes sont tous mauvais, un peu trop caricatural, tout semble trop facile, trop prévisible, trop bien arrangé pour satisfaire les désirs de l’auteur et lui permettre de mettre en exergue tous les problèmes qu’elle souhaite soulever. Tout est trop évident et la démonstration est bien trop convenue.
Ce récit souffre de la comparaison avec ceux d’autres femmes africaines qui ont écrit elles aussi, Depuis Mariama Bâ au moins, sur le sort des femmes africaines. Elles sont nombreuses, en effet, à avoir témoigné dans des livres plus poignants, plus profonds, plus convaincants sur ce sujet et sur le devenir de l’Afrique en général : Léonora Miano, Nozipo Maraire, Petina Gappah, etc…