L’éveil de l’Ange – Eva Delambre
Si le monde de la domination, du sadomasochisme et des diverses dépendances qui peuvent exister dans les relations sexuelles, vous intrigue, vous interpelle, si vous voulez essayer de comprendre les motivations de ceux qui s’adonnent à de telles pratiques, le livre d’Eva Delambre vous indiquera quelques orientations, un chemin possible à emprunter dans les pas de l’Ange et de son Maître. Ce texte jamais vulgaire, jamais grossier, jamais trivial, tout juste sensuel, sexuel, érotique, passionné, n’est, comme l’indique son titre, qu’un « éveil », une ouverture, à une autre forme de vie, une direction à prendre pour échapper à une existence ordinaire, plate, banale, sans émotions, Il ne fait jamais l’apologie des pratiques exposées, il montre, il décrit, il expose ce que cette jeune femme peut ressentir, ce qu’elle cherche, ce qu’elle espère trouver, ce qu’elle ressent…
Solange, au nom étêté par son maître pour devenir l’Ange de cette histoire, se retrouvant sans emploi cède à la pression de sa colocataire l’incitant à répondre à une annonce lancée par un homme qu’elle croyait déjà âgé, recherchant une personne capable d’écrire ses mémoires. Elle ne s’en croit pas capable mais elle finit par répondre à cette annonce, elle reçoit une réponse favorable et est très surprise de rencontrer un homme encore jeune et surtout très séduisant. Il lui raconte alors sa vie de Maître qui soumet des jeunes femmes consentantes à la recherche de sensations nouvelles. L’Ange est très troublée par ces récits, elle a du mal à transcrire ces aventures avec ses mots, elle est émue jusque dans sa chair, elle a des frissons et peu à peu elle ressent ce que les héroïnes de ces récits ont pu éprouver. Elle succombe rapidement au charme de son employeur et éprouve de plus en plus l’envie d’être possédée comme les femmes dont elle transcrit les épreuves. Et, un soir, elle finit par sceller le collier de la soumission autour de son cou se livrant ainsi totalement à son employeur qui devient alors son Maître. Le Maître qui va la conduire lentement mais sûrement sur le chemin de la soumission, ce livre n’est que le cheminement que l’Ange doit accomplir pour éventuellement accéder à la réelle formation à la soumission. Il faudra attendre la fin du récit pour connaître le destin que le maître proposera à l’Ange et le choix que celle-ci fera.
Selon Maître Tesamo, le préfacier, « Le monde du BDSM est complexe et laisse souvent des questions sans réponse. Pourquoi certains êtres éprouvent-ils le besoin d’une mise à nue aussi profonde de leurs fantasmes, de leurs envies, au point de faire naître des désirs obsédants qui les pousseront à l’action au péril parfois d’équilibres fragiles dans leur vie ? » Eva Delambre apporte un élément de réponse à cette question dans une version où on ne « verra aucunes allusions autobiographiques et pourtant elles sont là, enfouies sans doute dans quelques histoires, des émotions, des positions…. ». Pour ma part, je ne m’aventurerai pas jusque à ce point, je ne sais pas ce qu’Eva connait de ce milieu, je peux juste dire que son récit est fort crédible, qu’il sonne juste, qu’il est bien écrit et qu’on a envie d’y croire et même d’en savoir plus, de connaître la suite, de suivre l’Ange dans le choix qu’elle aura fait.
Eva Delambre a évité les pièges de la pornographie et de la pudibonderie, elle ne sombre jamais dans le racolage à deux sous ni dans la mièvrerie étalée dans de nombreux romans érotiques. Elle raconte seulement l’histoire d’une jeune femme qui a fait un choix différent de celui de la plupart des autres femmes. Elle décrit le parcours que cette jeune devra emprunter pour parvenir à ce que son Maître attend d’elle : une acceptation totale de ce qui lui est infligée, un abandon d’elle-même « … Juste parce que tu saurais, au fond de toi, que j’ai ce pouvoir absolu sur toi. Ce droit. Tous les droits. Tu penserais ta condition, tu vivrais ta condition, tu respirerais ta condition : soumise. Ma soumise. Viendrais un jour, où tu ne ressentirais vraiment, réellement, au plus profond de toi, rien d’autre que ta condition… Mon œuvre. Ma création. »