29 août 2015 ~ 0 Commentaire

Là où le ciel rejoignait les collines – Vladimir Makanine

Là où le ciel rejoignait les collines, au cœur de l’Oural, là où il est né, là où il situe certaines de ses nouvelles, notamment la nouvelle éponyme de ce recueil, Vladimir Makanine évoque, à travers les six textes rassemblés sous ce titre, la Russie profonde, la Russie rurale et millénaire troublée par la révolution bolchévique, la Russie figée, sclérosée, où chacun a une place de laquelle il ne peut pas s’échapper pour voir plus loin, ailleurs, …

Seule la chance peut faire changer le cours de la vie et même dans certaines conditions seulement car pour avoir les faveurs de la chance, il faut qu’un autre subisse les affres de la malchance. Changer sa vie, lui donner un sens requiert une grande habilité et si la chance est à peu près le seul moteur du changement, le mariage ou la vie en couple peut-être aussi une opportunité de changement et, dans ce cas, il faut bien choisir son conjoint et éviter de tomber dans les chausse-trappes du sentimentalisme pour se confiner dans une sécurité matérielle rassurante. Cette stabilité est si précieuse, dans un tel contexte social, que le moindre signe avant coureur peut être un signal de disgrâce qu’il faut savoir interpréter pour bien choisir ses amis et relations. Et quand la perle est trouvée, il faut savoir la garder et la tenir solidement enchaînée pour ne pas qu’elle parte ailleurs. Ailleurs, c’est peut-être là où est la réussite mais celle-ci est souvent acquise au détriment d’autrui comme la gloire que ce compositeur a atteinte, au détriment de son village, pense-t-il, qui lui a payé ses études et qui a oublié ses vieilles chansons traditionnelles qui ont fait sa fortune. Voilà la trame des six nouvelles qui composent ce recueil.

Makanine est souvent présenté comme le dernier des grands romanciers russes de l’ancienne époque, on pourrait sans doute le placer dans la filiation des Leskov, Gontcharov et autres. Il est seulement né un peu trop tard pour connaître leur succès et il a dû composer avec le régime soviétique qui l’a conduit à l’exil. On ressent bien dans ses nouvelles, écrites en pleine période brejnévienne, tous les efforts qu’il dû consentir pour éviter les écueils de la censure en slalomant entre les interdits et tout ce qu’il vaut mieux ne pas évoquer. Il ne fait aucun commentaire sur le contexte, il se contente de rapporter les petite soucis de ces petites gens qui n’ont pas accès aux grands problèmes et qui gonflent leurs petits ennuis pour échapper à leurs occupations et préoccupations quotidiennes et avoir l’impression d’exister pour autre chose.

« … les gens de la vieille génération sont capables de se passionner pour n’importe quoi. Ils n’ont plus la foi au vieux sens du terme, mais leur capacité de croire ne s’est pas encore émoussée, c’est sans doute pour ça qu’ils sont légèrement fantasques. »

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